Biologie Cellulaire

Culture Cellulaire : Le sérum

Les sérums d'origine animale sont traditionnellement utilisés à titre de suppléments des milieux de base pour la culture des cellules de mammifères. En effet, si le milieu de base assure la survie des cellules, celles-ci ne peuvent se diviser que sous l'influence de facteurs mitogènes apportés par le sérum.
Sa concentration varie selon les cultures de 2 à 20%. Il est indispensable au déclenchement de la division cellulaire car il contient des facteurs mitogènes. Son effet cytostimulant est réputé inversement proportionnel à l'âge du donneur (sérum de veau fœtal, sérum de veau nouveau-né, sérum de veau adulte).
Les recherches intensives qui se sont développées dans les années 1980 dans le but de définir les besoins cellulaires et de conduire à la fabrication de milieux sans sérum ont permis d'identifier un certain nombre d'éléments clés des sérums, même si les facteurs actifs de ces derniers restent encore largement indéfinis. Parmi les composants du sérum intervenant dans la croissance cellulaire, nous citerons :

• Des substances de faible poids moléculaire, sels minéraux, nutriments (glucose, acides aminés, cholestérol, acides gras essentiels), métabolites, vitamines et oligo-éléments liés aux protéines sériques ;

• Des facteurs d'attachement favorisant l'adhésion et l'étalement des cellules sur le support, qu'il s'agisse de verre, de plastique ou de microporteurs. La majorité des cellules adhérentes ne se fixent pas directement sur leur support mais sur des protéines elles-mêmes adsorbées sur celui-ci. Ces protéines, sécrétées par les cellules ou apportées par le sérum sont des composants de la matrice extra-cellulaire : fribronectine, laminine, vitronectine ; elles se fixent par des sites spécifiques sur des récepteurs cellulaires, eux-mêmes hautement spécifiques. Ces facteurs d'attachement jouent un rôle important non seulement en ce qui concerne l'adhésion des cellules à leur support mais également sur leur croissance, leur morphologie, leur différenciation et leur durée de vie.
La fibronectine grosse glycoprotéine de PM = 440 000, présente en grande quantité dans le plasma est essentiellement produite par les hépatocytes.

• Des hormones et des facteurs de croissance polypeptidiques dont il est difficile de définir les différences mais qui tous jouent un rôle primordial dans la prolifération et le métabolisme cellulaire.
Parmi les hormones, nous citerons l'insuline qui exerce un effet mitogène secondaire et la somatomedine C ou « Insuline-like growth factor » qui n'est pas sous forme libre mais transportée par une protéine.
Parmi les facteurs de croissance, nous citerons le PDGF ou Platelet Derived Growth Factor présent dans les plaquettes et dont le rôle mitogène est très important puisque les plasmas obtenus après élimination des cellules sanguines par moyens physiques sont beaucoup moins actifs sur la croissance cellulaire que les sérums obtenus par coagulation. D'autres facteurs de croissance FGF (Fibroblast Growth Factor), EGF (Epidermal Growth Factor) sont également présents dans les sérums.
Hormones polypeptidiques et facteurs de croissance se fixent sur des récepteurs spécifiques présents sur la membrane cellulaire. Certains, (insuline, EGF), sont internalisés avec leur récepteur puis dégradés par des enzymes lysosomiales ou liés à des récepteurs internes. Les facteurs de croissance peuvent donc agir au niveau de la membrane plasmique ou de l'intérieur de la cellule. La transmission de signaux depuis la membrane après fixation du polypeptide sur son récepteur jusqu'au site de synthèse des macromolécules peut se faire par l'intermédiaire d'un messager (AMP cyclique pour l'insuline) ou par celui du cytosquelette.

• Des protéines diverses dont les unes jouent le rôle de facteurs de croissance, ce sont les protéines assurant le transport de minéraux, de lipides ou d'hormones (transferrine, albumine,...) alors que les autres sont inhibitrices des protéases comme l'alpha 2 macroglobuline qui bloque l'action de la trypsine.

Avantages et inconvénients liés à l'emploi de sérum

Les avantages liés à l'emploi de sérums, ajouts indispensables des milieux de culture traditionnels sont nombreux ; outre leur rôle majeur d'agent mitogène, les sérums protègent les cellules vis-à-vis de différents paramètres physiques - choc dans le cas de cellules en suspension, viscosité, osmolarité, apport en gaz -, contre l'action des enzymes protéolytiques grâce à leurs inhibiteurs de protéase, et grâce à la sérum albumine empêchent l'adsorption des produits synthétisés (anticorps monoclonaux... ) sur les parois du bioréacteur.

Milieux sans sérum

Généralités

Les milieux sans sérum ont fait l'objet d'une abondante littérature et leur emploi pour la culture des cellules de mammifères connaît un succès toujours croissant. L'évolution considérable qu'ils ont subie depuis les premières formulations établies dans les années 1970 est étroitement tributaire des progrès qui ont été faits dans l'isolement et la caractérisation des nutriments, hormones, facteurs de croissance, produits issus de la matrice extra-cellulaire ; tous ces produits sont indispensables à la croissance cellulaire in-vitro et leur adjonction aux formulations de base a permis de s'affranchir des besoins en sérum ou tout autre liquide biologique.
Au cours des 10 dernières années, les milieux sans sérum ont vu leurs domaines d'application se diversifier de plus en plus aussi bien pour ce qui concerne la croissance cellulaire que l'obtention des produits cellulaires dérivés ; à titre d'exemple, nous citerons la production des anticorps monoclonaux, celle des antigènes viraux et celle des protéines recombinantes issues aussi bien des cellules de mammifères que des cellules d'invertébrés (3.4).
L'emploi des milieux sans sérum procure de nombreux avantages, qui tous sont à mettre en relation avec le caractère « défini » de ces formulations.
S'affranchir de l'emploi de sérum, qu'il soit d'origine humaine ou animale, permet de contrôler l'ensemble des produits bruts entrant dans la composition d'un milieu de croissance et ainsi d'éliminer ou de réduire au maximum les possibilités de contamination par les virus adventices.
Les formulations sans sérum, en raison de leur composition définie et de leur teneur réduite en protéines, facilitent par leur emploi les étapes ultérieures de purification auxquelles sont soumis les produits cellulaires dérivés. Ainsi dispose-t-on à l'heure actuelle de produits commercialisés sans protéines adaptés à la croissance des hybridomes ou à celles de différents types cellulaires employés pour l'expression des protéines recombinantes. L'emploi de tels milieux permettra à la protéine exprimée par les cellules d'être la seule présente dans le milieu au terme de la culture.
L'emploi de milieux sans sérum apporte également la garantie d'une qualité constante, en éliminant la variabilité inhérente à l'utilisation de sérum, dont on connaît les variations de qualité de lot à lot.
Les formulations sans sérum présentent en outre l'avantage de pouvoir être optimisées en vue de la croissance d'un type cellulaire spécifique. Cet atout revêt une importance primordiale dans le domaine des biotechnologies avec la production à l'échelle industrielle des anticorps monoclonaux et protéines recombinantes.

Les fonctions assurées par le sérum

  1. Transporteur / tampon / chélateur de substances nutritives instables ou non solubles (lipophiles) dans l'eau.
  2. Absorbe et neutralise les toxines.
  3. Fournit des inhibiteurs de protéases qui réduisent l'activité de la trypsine.
  4. Fournit des protéines qui transportent des substances de faible poids moléculaire.
  5. Promeut l'attachement des cellules à la surface du support.
  6. Fournit des substances nutritives essentielles d'un faible poids moléculaire.
  7. Fournit des hormones et des facteurs peptidiques de croissance.
  8. Empêche l'absorption non-spécifique de facteurs critiques sur la paroi du réacteur et sur les filtres.
  9. Module les caractéristiques physico-chimiques du milieu (viscosité, osmolalité colloïdale, taux de diffusion...) - protège les cellules en culture agitée.
  10. Sert de tampon.

Problèmes et désavantages liés à la présence de sérum dans les milieux de culture pour cellules animales

  1. Composition variable.
  2. Coût élevé - problème de pénurie.
  3. Possibilité de contamination (mycoplasmes, bactériophages, virus, bactéries, champignons, prions).
  4. Source de toxines et de pyrogènes.
  5. Source d'inhibiteurs, qui peuvent agir négativement sur la croissance cellulaire et la production de certaines substances biologiques (par exemple : production de virus).
  6. Provoque la modification de la surface cellulaire.
  7. Empêche la définition de l'environnement nutritionnel.
  8. Viscosité élevée (réduction de la vitesse de filtration).
  9. Interférence avec la purification de produits (par exemple : la présence d'immunoglobulines lors de la production d'anticorps monoclonaux).
  10. Supporte préférentiellement la croissance des fibroblastes dans des cultures primaires (par rapport aux autres types de cellules).

Malgré cela, son utilisation diminue car tous ces avantages n'excluent pas un certain nombre d'inconvénients :
• nature indéterminée du sérum ne permettant pas de constituer un environnement parfaitement défini aux cellules.
• variabilité de qualité d'un lot à l'autre, d'où la nécessité de prétester les lots avant emploi ; concentration d'hormones ou de facteurs de croissance instables d'un lot à l'autre.
• présence possible de virus adventices, de mycoplasmes.
• présence d'immunoglobulines sériques.
• problèmes rencontrés lors de la purification ultérieure des protéines sécrétées s'il s'agit d'hybridomes ou de cellules modifiées par génie génétique et excrétant des protéines recombinantes.

Facteurs de croissance pour la culture de cellule

Définition

Un facteur de croissance est une molécule qui répond aux critères suivants :
* La majorité de la structure est polypeptidique
* Son interaction avec la membrane de la cellule cible initie la réponse cellulaire qui est déclenchée uniquement par la formation d'un complexe spécifique avec un récepteur
* De la formation du complexe facteur de croissance / récepteur résulte spécifiquement une réponse hypertrophique (augmentation de ta taille des cellules), une réponse hyperplasique (augmentation de la population cellulaire), une réponse qui induit ou bloque une étape de fe différenciation.
* Le facteur de croissance et son récepteur sont éliminés de la cellule par endocytose. *- Les facteurs de croissance sont donc distincts des hormones de type stéroïdes ou prostaglandines par leur nature chimique et par leur mode d'action. Les facteurs de croissance agissent plutôt de façon paracrine ou autocrine.

Principaux facteurs de croissance caractérisés

* L Epidermal growth factor, EGF.
* L'insulin like growth factor, ILGF, activité insulin like non suppressible par les anticorps anti-insuline
* Le Nerve growth factor, NGF, facteur augmentant la survie et la différenciation des cellules gliales
* Le platelet derived growth factor, PDGF, glycoprotéine ayant une activité tyrosine kinase, est le mitogène principal des cellules mésenchymateuses
* Le transforming growth factor, TGF, famille de facteurs, le TGF est plutôt inhibiteur de la prolifération cellulaire.
* Le Fibroblast growth facteur, FGF, est aussi une famille nombreuse de facteurs qui stimulent in vitro la croissance de cellules d'origine mésodermîque et ectodermique ; ces facteurs présentent une grande affinité pour l'héparine.
Cette liste n'est pas exhaustive ; d'autres molécules sont mises à jour chaque année, ainsi que de nouvelles propriétés ou caractéristiques pour chacun de ces facteurs.

Mécanismes d'action

On pense que les facteurs de croissance agissent par une activation des phosphoinositides et de la phospho kinase C (comme pour le PDGF), une phosphorylation directe des protéines intracellulaires par le récepteur (c'est peut-être le cas de l'EGF ou du FGF).

Modulation de l'activité des facteurs par l'environnement

Puisque l'activité des facteurs de croissance sur des cellules données dépend de l'accessibilité des récepteurs membranaires et de la capacité des mécanismes de transduction du signal à s'exprimer, il apparaît que la matrice extracellulaire qui va à la fois fournir des facteurs éventuellement contradictoires va jouer un rôle régulateur important et que, selon l'environnement de la cellule, elle sera plus ou moins sensible à ces différents facteurs.

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